Au Ras des Comètes
Une performance de Cécile Colle - Ralf Nuhn, interprétée par Marie-Bénédicte Cazeneuve | durée : 40 minutes
Le texte de la performance s’appuie sur l’inventaire non-exhaustif des œuvres en dépôt à cONcErn-infrastructure artistique.
La performance sera suivie d’une table ronde autour de notre conception de « la logistique sensible » et de « la médiation congrue » appliquée à cONcErn.
cONcErn - infrastructure artistique est un projet participatif initié en 2013 par les artistes Cécile Colle et Ralf Nuhn. Conçu comme expérimentation artistique, cette infrastructure s’intéresse aux œuvres d’art qui, suite à des problèmes logistiques, risquent la destruction involontaire. Par ces situations concrètes, nous voulons mieux comprendre et interagir avec les cycles de vie des œuvres d’art.
Nous essayons, avec les auteurs, mais aussi avec d’autres, le public et les professionnels de l’art, d’évaluer et de répondre aux problèmes logistiques que certaines œuvres rencontrent. Mais c’est en s’appuyant sur la force des œuvres elles-mêmes et sur leur pouvoir de générer des expériences esthétiques et sensibles que nous voulons innover une logistique qui leur soit propre. Basé sur l’ensemble de ces expériences, cONcErn mène une recherche autour des enjeux de la pratique artistique dans le contexte actuel. Cette recherche se traduit par des actions culturelles, des tables rondes et des publications. Le premier outil que nous avons mis en place pour mener nos expériences et réflexions, est le dépôt cONcErn. Aux abords de la rivière nommée l’Œil, au centre géographique de la France, à Cosne-d’Allier, une friche industrielle s’étend sur près de trois mille mètres carrés. Anciennement dédiée au travail du métal et du bois pour la fabrication de remorques agricoles, les lieux se composent de différents espaces : intérieurs, couverts, ou espaces verts. Ce lieu nous permet d’accueillir des œuvres menacées de destruction involontaire.
Le dépôt est un lieu ouvert où les œuvres restent en relation avec le public et continuent les échanges qui leur sont vitaux. Dans un espace commun les œuvres sont réactivées par les flux mêmes du milieu qu’elles créent. Le dépôt cONcErn est aussi une sorte de zone tampon qui laisse le temps aux artistes de décider du sort de leur travail. C’est un espace de repos pour les œuvres où il est possible de développer pour elles et grâce à elles de nouvelles approches concernant la production artistique, les pratiques des artistes, la médiation et les politiques culturelles.
Performance Au ras des comètes :
« L'ombre de la dégradation ou de la disparition plane sur les œuvres en dépôt à cONcErn. C'est le postulat qui fait justement qu'elles sont arrivées là. Toutes ont souffert d'un problème qui n'était pas d’ordre esthétique mais plutôt d'ordre logistique. Nous poursuivons ici notre idée que la logistique qui entoure les œuvres d'art doit être convertie en expérience esthétique et sensible afin que les œuvres ne cessent jamais d'exercer leur pouvoir en ce domaine. L'inventaire fait partie des pratiques logistiques et il est bien normal, lorsqu’on s'occupe d’un dépôt, de se livrer à cette tâche. Nous avons alors décidé d’aborder l'exercice sous la forme d'un récit le plus radicalement subjectif. De cette manière, ces œuvres pourraient trouver dans nos imaginaires un prolongement de leur existence et continuer d'alimenter notre expérience.
Nous avons confié notre récit à Marie-Bénédicte Cazeneuve. Qui, mieux qu'une actrice pouvait prendre en charge notre inventaire et le transmettre à d'autres subjectivités? Telle une ambassadrice du pays cONcErn en zones étrangères, forcée de se passer de la présence des œuvres originales, elle va devoir les évoquer, les faire revivre, pour nous, par la seule preuve de l'inventaire, par le seul pouvoir des mots. Le fait que l'ambassadrice ait appris le texte par cœur a son importance. Il nous semble qu'au moment où la mémoire et le cœur s'unissent, l'acte de transmission se charge d'un supplément tragique. Il devient acte de résistance contre l'oubli et l'anéantissement. Pour ne pas oublier les œuvres en dépôt à cONcErn, conjurer leur disparition présagée, il nous semble bon d'en faire l'éloge, la publicité, d'en parler en d'autres lieux. Vu sous cet angle, l'inventaire, prend des allures d'outil nécessaire à la protection. Pensons aux inventaires de faunes et flores qui, bien souvent, sont orientés vers un souci de préservation d'un site, d'un biotope et des espèces qui l'habitent et le constituent. »